Protection de la Jeunesse
Le Conseil des Ministres a approuvé la note cadre concernant la réforme de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse.
Le Conseil des Ministres a approuvé la note cadre concernant la réforme de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse.
Pour rappel, l'accord du gouvernement du 9 juillet 2003 a explicitement prévu de moderniser la loi sur la protection de la jeunesse et ceci, "dans un souci d'assurer une meilleure protection des jeunes et de leur accorder toutes les chances et toute l'aide pour s'intégrer dans notre société exigeante. Ce nouveau droit de la jeunesse doit prévoir, en outre, des mesures de type " sanctionnelles " pour les jeunes délinquants à l'égard desquels ces mesures constituent le seul instrument pour protéger notre société contre leurs activités criminelles". Le projet de réforme proposé par Laurette Onkelinx, la Vice première Ministre et Ministre de la Justice, vise, tant à consacrer légalement certaines pratiques qui se sont développées ces dernières années, qu'à introduire certaines innovations dans la prise en charge du mineur qui a commis un fait qualifié d'infraction. Pourquoi une réforme de la loi de 65 ? En ce qui concerne la délinquance juvénile, force est de constater que même si le système protectionnel en vigueur se montre adapté pour 90% des situations actuellement rencontrées, il montre aujourd'hui ses limites dans l'approche des jeunes délinquants multirécidivistes ou auteurs de faits de délinquance grave. Par ailleurs, certains comportements délictueux dangereux peuvent trouver leur origine dans le contexte familial : des dispositions devront être prises à l'égard des parents afin de les mener à une responsabilisation pleine et entière. Quelle que soit la situation de danger rencontrée, la réponse à l'égard d'un mineur doit avant tout être éducative, rapide, précoce, efficace et préventive, notamment par le biais de mesures de protection, d'éducation et de contrainte. Il ne s'agit donc pas d'une refonte totale de la loi de 65, loin de là. Le but de la réforme sera principalement de renforcer les moyens mis à la disposition des procureurs du Roi et des juges de la jeunesse afin de : - permettre au mineur d'être l'acteur de sa " réparation " - privilégier l'éducation du mineur dans son cadre de vie - diminuer le recours au placement en institutions communautaires Les propositions de réforme : * donner aux procureurs du Roi les pouvoirs afin d'agir vite et mieux : - la pratique du rappel à la loi, soit un rappel des risques encourus suite à l'infraction commise - la pratique de la médiation réparatrice qui permet notamment: * une indemnisation des victimes éventuelles * de rétablir le lien social avec les victimes éventuelles * élargir l 'éventail de mesures mises à la disposition du juge de la jeunesse : Dans la pratique, les magistrats de la jeunesse ont développé de nouvelles réponses à la délinquance juvénile qu'il faut soutenir et développer. Il s'agit notamment de : - la pratique de la conciliation réparatrice, à l'instar de médiation réparatrice pratiquée par le procureur du Roi - l'introduction de prestations éducatives et d'intérêt général, au provisoire comme au fond et ce, en collaboration avec la protection civile ou dans le cadre d'opérations humanitaires de la défense nationale - permettre au juge de la jeunesse d'avoir recours à d'autres types de placement plus adaptés à la personnalité du mineur (psychiatrie & toxicomanie) et ce pour un délai bien déterminé. Ceci permet aussi de désengorger les IPPJ de jeunes qui n'y ont pas leur place. Le choix de ces mesures sera facilité par l'élaboration d'une liste de critères. L'application de ces mesures pourra aussi être assortie de conditions spécifiques (fréquentation scolaire, formation/sensibilisation, non fréquentation de certains milieux). * permettre au mineur de se responsabiliser par rapport aux faits commis Ce projet a pour but d'instaurer la possibilité pour le mineur de présenter au juge de la jeunesse un projet écrit de " mesures " auquel il souhaite se soumettre. Si ce projet est accepté par le juge, il est entériné dans un accord. Un contrôle efficace de l'exécution de cet accord sera mis en place. En cas de non-exécution, le juge de la jeunesse pourra prévoir une autre mesure. Cette nouvelle option laissée au jeune délinquant lui permet ainsi de se responsabiliser par rapport aux actes commis (il devient acteur de la solution) et de choisir au mieux et en toute connaissance de cause, les mesures éducatives voire réparatrices qui lui seront utiles et nécessaires. * responsabiliser les parents par rapport aux faits commis par leurs enfants L'importance du rôle des parents et des personnes qui ont légalement la garde du mineur délinquant a encore été rappelée par une recommandation du Conseil de l'Europe concernant les nouveaux modes de traitement de la délinquance juvénile et le rôle de la justice des mineurs (Rec (2003)20 adoptée par le Comité des Ministres le 24 septembre 2003, lors de la 853e réunion des Délégués des Ministres). " Il conviendrait d'encourager les parents (ou les tuteurs légaux) à prendre conscience de leurs responsabilités envers le comportement délictueux des jeunes enfants et à les assumer. Ils devraient être présents aux audiences des tribunaux (à moins que cela ne soit considéré comme allant à l'encontre du but visé) et, lorsque les circonstances le permettent, se voir proposer aide, soutien et conseil. Si cela se justifie, ils devraient être tenus d'accepter un accompagnement psychosocial ou de suivre une formation à l'exercice des responsabilités parentales, de veiller à ce que leur enfant fréquente l'école et d'assister les organismes officiels dans l'exécution des sanctions et mesures dans la communauté ". Dans cet esprit, certaines mesures pourront être prises à l'égard des parents démissionnaires ou manifestant un désintérêt caractérisé à l'égard de leurs enfants. Par leur absence de réaction face à ces faits de délinquance répétés, ces parents détériorent la situation de leurs enfants. Il est indispensable que les parents s'associent aux différentes étapes de la procédure. A cet égard, ils seront systématiquement convoqués. En cas de non-comparution sans motif valable (par désintérêt des parents), ces derniers pourraient être condamnés à une amende de 150 EUR. Le tribunal pourrait aussi ordonner un stage parental afin de donner aux parents démissionnaires les moyens de (ré)instaurer une autorité parentale positive au sein de la cellule familiale. Quelles solutions pour les (multi)récidivistes et auteurs de faits de délinquance grave ? Ces cas faisaient l'objet de placements en milieu fermé à répétition et, exceptionnellement, faisaient l'objet d'un dessaisissement. Mais avant de parler de dessaisissement, il est important de noter que le panel de nouvelles mesures qui lui seront consacrées dans la loi devrait permettre à terme de diminuer les cas de dessaisissement. Qu'est ce que le dessaisissement ? Il s'agit d'une possibilité particulière et exceptionnelle laissée au tribunal de la jeunesse de renvoyer le dossier d'un jeune (de plus de 16 ans au moment des faits) devant une juridiction ordinaire réservée aux adultes. Une chambre correctionnelle spécifique du tribunal de 1ère instance ou de la cour d'appel sera prévue à cet effet. Le tribunal de la jeunesse utilise cette possibilité " en dernier recours ", lorsqu'il estime - sur base d'un rapport médico-psychologique et d'une étude sociale - qu'aucune des mesures qu'il a à sa disposition et qu'il pourrait prononcer à l'égard du jeune sont adéquates. On compte actuellement près de 130 cas de dessaisissement par an (106 en 1999 - 134 en 2000 - 135 en 2001 => dont 31 en Flandre, 39 en Wallonie et 65 à Bxl). Les conditions d'un dessaisissement resteront identiques (étude sociale et examen médico-psychologique se prononçant spécialement sur l'opportunité du dessaisissement) mais les délais de procédure seront précisés et réduits. Qu'advient-il du jeune pendant la procédure dessaisissement ? La Belgique s'est conformée, en janvier 2002, aux directives de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant. En conséquence et compte tenu l'insuffisance de places en section fermée des institutions communautaires, le centre fédéral fermé d'Everberg a été créé. Dans le cadre de cette réforme, il est proposé que le mineur, qui se trouve en section fermée d'IPPJ et qui fait l'objet d'une citation en dessaisissement, soit transféré vers un centre fédéral fermé (actuellement Everberg) pendant la durée de la procédure en dessaisissement et ceci, sous réserve du nombre de places disponibles. Après dessaisissement, où le jeune purge-t-il la peine prononcée par la juridiction réservée aux adultes ? Comme pendant la procédure de dessaisissement, la peine sera exécutée dans un centre fédéral fermé (actuellement Everberg), sous réserve du nombre de places disponibles. Le Code de procédure pénale sera modifié à cet effet. En cas d'agression, d'évasion ou en cas de force majeure, la loi prévoira néanmoins les possibilités d'orientation des jeunes placés au centre fédéral fermé vers le système classique pénitencier. L'encadrement et la prise en charge spécifique de ces jeunes délinquants feront l'objet d'un accord de coopération entre l'Etat fédéral et les Communautés en ce qui concerne leurs compétences respectives. Ces jeunes feront l'objet de conditions de réinsertion sociale spécifiques et adaptées (permissions de sortie, congés pénitentiaires, libération conditionnelle, etc.). Quelles seront les prochaines étapes ? La réforme proposée sera soumise à l'examen et à la discussion (ou à la consultation) de différents professionnels actifs sur le terrain. Le rapport sera clôturé pour le 15 mars prochain. L'avant-projet de loi, qui suivra les consultations visées supra, sera soumis à la concertation avec les communautés telle que prévue par les lois sur les réformes institutionnelles. Cette concertation doit permettre d'optimaliser une action rapide et performante face à la délinquance juvénile. La réussite de cette réforme dépend aussi en grande partie des moyens budgétaires accordés et d'une union efficace et structurée des forces des pouvoirs fédéraux et communautaires.