Bien être de l'enfant
Sur proposition de Madame Laurette Onkelinx, Vice-Première Ministre et Ministre de la Justice, le Conseil des Ministres a approuvé l'avant-projet de loi tendant à privilégier l'hébergement égalitaire de l'enfant dont les parents sont séparés et réglementant l'exécution forcée en matière d'hébergement d'enfant, ainsi que les projets d'arrêtés royaux nécessaires à l'entrée en vigueur de l'augmentation des seuils d'insaisissabilité lorsque le débiteur a un ou plusieurs enfants à charge.
Sur proposition de Madame Laurette Onkelinx, Vice-Première Ministre et Ministre de la Justice, le Conseil des Ministres a approuvé l'avant-projet de loi tendant à privilégier l'hébergement égalitaire de l'enfant dont les parents sont séparés et réglementant l'exécution forcée en matière d'hébergement d'enfant, ainsi que les projets d'arrêtés royaux nécessaires à l'entrée en vigueur de l'augmentation des seuils d'insaisissabilité lorsque le débiteur a un ou plusieurs enfants à charge.
L'hébergement des enfants en cas séparation : une évolution des pratiques Jusqu'il y a une quinzaine d'années, l'hébergement principal des enfants était, sauf exception, confié à la mère avec un droit de visite pour le père, généralement octroyé un week-end sur deux, parfois le mercredi et la moitié des vacances scolaires. Il est à présent unanimement reconnu que les deux parents doivent s'investir dans l'éducation de leur(s) enfant(s). Ce principe, renforcé par la Convention de l'ONU de 1991 relative aux droits de l'enfant, a constitué le fondement de la loi du 13 avril 1995 consacrant l'autorité parentale conjointe. Depuis 1995, de plus en plus de juges admettent le principe de l'hébergement égalitaire ou alterné (*). La jurisprudence actuelle considère néanmoins que l'hébergement égalitaire n'est possible qu'en cas d'accord des deux parties au motif principal que cette solution ne peut fonctionner que lorsque les parents s'entendent un minimum à tout le moins sur les modalités d'hébergement. Il s'agit déjà d'une avancée alors que quelques années plus tôt, certains tribunaux refusaient purement et simplement l'application de l'hébergement égalitaire et ceci, même en cas d'accord des parents. C'est la technique du cas par cas qui est actuellement pratiquée en matière d'hébergement des enfants en cas de séparation. Cette pratique, qui rend aléatoire l'issue d'un procès, a pour effet de multiplier les procédures judiciaires où chacun " tente sa chance " et c'est souvent le parent le plus intransigeant qui obtient gain de cause. Le côté aléatoire est renforcé de par le fait que chaque juge ayant sa sensibilité propre sur la meilleure formule à adopter. On pourrait parler d'un "modèle par juge ". Privilégier l'équilibre des enfants L'hébergement égalitaire n'est pas la solution idéale en toute situation mais, lorsque la séparation est inéluctable, la meilleure formule est de favoriser l'entente entre les parents. Rien n'est plus destructeur pour l'enfant qu'un procès douloureux entre ses père et mère. Dans les faits, la décision concernant l'hébergement des enfants est souvent prise en urgence au début de la séparation. Le juge est alors contraint de trancher sur la base d'éléments partiels (attestations, procès-verbaux de police relatant une scène isolée, comportement des parties à l'audience, etc.). Bien que la juge statue souvent à titre provisoire dans l'attente d'une mesure d'instruction (enquête sociale, expertise,...), sa première décision s'avère souvent définitive - sauf exception - car les renseignements recueillis par la suite sont insuffisants pour remettre en cause une situation acquise au fil du temps ou parce qu'une nouvelle décision pourrait simplement mettre en péril la stabilité de l'enfant. Une importante majorité du groupe " Familles et droits civils et judiciaire " qui s'est réuni de novembre 2003 à mars 2004 dans le cadre des " Etats généraux des Familles " a plaidé pour " l'instauration d'un modèle législatif qui s'imposerait au juge à défaut d'autres éléments ". Dans le respect de la notion d'exercice conjoint de l'autorité parentale inscrite dans la loi du 13 avril 1995, ce modèle ne pouvait être qu'égalitaire. Il devait donc préconiser une répartition égalitaire du temps d'hébergement entre les parents afin de favoriser une réelle co-responsabilité parentale. Mise en place d'un modèle souple d'hébergement égalitaire L'avant-projet de loi propose un modèle souple qui privilégie l'hébergement égalitaire. Ce modèle encouragera la volonté d'aboutir à un accord, puisque l'on ne pourra s'en écarter que pour des raisons motivées. L'hébergement égalitaire deviendrait donc la norme pour autant que l'autorité parentale soit conjointe : il sera écarté lorsque le tribunal attribue l'autorité exclusive à l'un des parents. En cas d'autorité parentale conjointe, le juge pourra néanmoins adapter l'hébergement en fonction de situations particulières (éloignement géographique, indisponibilité, fratrie, très jeune âge de l'enfant, etc.) : il devra alors motiver sa décision. En revanche, ce ne sera plus le parent qui sollicite l'hébergement égalitaire qui devra démontrer la pertinence de celui-ci mais au parent qui s'y oppose de démontrer qu'il existe une contre-indication. Le modèle d'hébergement égalitaire devrait se généraliser, mais la formule ne s'imposera pas immédiatement puisque la loi laissera aux tribunaux un pouvoir d'appréciation important en fonction de circonstances spécifiques. Simplification des procédures Le projet modifiera en outre les règles de procédure applicables au tribunal de la jeunesse en matière d'autorité parentale et d'hébergement : - en soulignant l'opportunité de recourir aux mesures provisoires, - en instaurant une réévaluation de la situation (notamment lorsque l'hébergement égalitaire n'est pas immédiatement ordonné), - en introduisant le mécanisme de la " saisine permanente " afin de ne pas imposer l'introduction d'une nouvelle procédure en cas de changement de circonstance : un simple dépôt de conclusions ou une demande écrite au greffe permettra au juge de réexaminer l'affaire afin d'éventuellement modifier une décision antérieure. Quelle solution en cas de non-respect des décisions d'hébergement prises par le juge ? Dans une telle situation, deux recours sont actuellement prévus par la loi : - le parent victime peut introduire une plainte pénale : comme la condamnation interviendra après plusieurs mois, certains parents peuvent voir la relation avec leur enfant sérieusement perturbée, voire perdre tout contact avec l'enfant. Cette situation peut en outre s'avérer préjudiciable pour l'enfant lui-même. - le juge peut ordonner une astreinte : cette dernière peut néanmoins s'avérer inefficace en cas d'insolvabilité de la partie récalcitrante. Lorsque des décisions de justice en matière d'hébergement ne sont pas exécutées, la partie victime de la non-représentation d'enfant est démunie : il est indispensable de tenir compte de la souffrance du parent qui éprouve des difficultés à faire respecter ses droits et de l'intérêt de l'enfant à entretenir un contact avec ses deux parents. Il est cependant inopportun de recourir à la force sans discernement par respect pour l'enfant et afin de préserver son équilibre. Dans cet esprit, l'avant projet de loi propose deux solutions concrètes au problème de non-représentation : - après constatation de l'infraction, le juge pourra réexaminer la situation et autoriser, le cas échéant, le recours à la contrainte. Dans ce cadre, il pourra imposer à l'huissier de justice d'être accompagné par une personne compétente afin que la reprise forcée se passe dans de bonnes conditions pour l'enfant concerné. - l'astreinte pourra être prélevée sous forme de saisie sur la rémunération ou sur les allocations sociales au même titre que la pension alimentaire, tel que prévu à l'article 1412 du Code judiciaire. Ce dernier sera donc modifié afin de permettre que la saisie soit étendue aux condamnations en matière d'astreinte pour ce qui concerne la violation de l'obligation de présentation de l'enfant. On peut, en effet, considérer que la non-présentation d'enfant est un comportement aussi grave que le non-paiement des pensions alimentaires. Ces deux carences sont sanctionnées pénalement, il est donc indispensable que les sanctions pécuniaires qui en découlent méritent la même efficacité. Entrée en vigueur de l'augmentation des seuils d'insaisissabilité En cas de saisie, l'article 1409 du Code judiciaire impose qu'une somme d'argent reste disponible pour assurer la dignité d'existence de la personne saisie. Actuellement, par exception, on peut saisir ces sommes lorsqu'il y a non-paiement des pensions alimentaires. Cette exception sera élargie. On pourra également saisir le montant des astreintes en cas de non-respect du droit de visite ou du droit de garde. (*) On préfère l'expression hébergement égalitaire à celle d'hébergement alterné car en réalité lorsque les parents sont séparés, et que l'enfant se rend chez l'un puis l'autre, son hébergement est toujours alterné ; l'hébergement égalitaire implique quant à lui une relation de temps similaire entre les deux parents.